Des champs d’espoir face à la sécheresse : vers un avenir prospère au Sahel
Comment le projet UE-APSAN-Mali transforme l'agriculture et la sécurité alimentaire

Des millions de personnes à travers l’Afrique devraient faire face à une exposition accrue aux sécheresses, inondations et vagues de chaleur extrême. Selon le rapport sur L'État du climat en Afrique 2023 de l’Organisation météorologique mondiale, sans mesures de réponse adéquates, jusqu’à 118 millions de personnes vivant dans une pauvreté extrême (définie comme vivant avec moins de 1,90 USD par jour) pourraient être de plus en plus touchées par ces événements liés au climat d’ici 2030.
Dans la région du Sahel, les impacts du changement climatique sont déjà visibles à travers des sécheresses prolongées et des régimes de pluies de plus en plus irréguliers. Ces bouleversements contribuent à une baisse de la productivité agricole et exercent une pression considérable sur les communautés, en particulier les femmes et les enfants, qui portent souvent une charge disproportionnée en période de crise.
En réponse, le projet intitulé Amélioration de la productivité agricole et de la résilience climatique pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle au Mali (UE-APSAN-Mali), financé par l’Union européenne, propose des solutions pratiques, ancrées localement. En promouvant une agriculture intelligente face au climat et des initiatives communautaires, le projet contribue à renforcer la résilience et à améliorer la sécurité alimentaire et nutritionnelle dans la région.
Un chemin vers la résilience : Les principales initiatives du projet UE-APSAN-Mali
Le projet UE-APSAN-Mali se concentre sur des interventions clés visant à renforcer la résilience au Sahel, notamment le développement, la distribution et la promotion de variétés de cultures à haut rendement, riches en nutriments et tolérantes à la sécheresse, adaptées au climat difficile de la région. Cela s’accompagne de renforcement des capacités à travers des formations techniques pour améliorer la production de cultures locales nutritives, avec pour objectif d’améliorer la nutrition et les revenus des ménages.
Le projet soutient également la formation à long terme d’étudiants intégrés aux programmes de sélection de sorgho, mil et arachide à l'Institut International de Recherche sur les Cultures des Zones Tropicales Semi-Arides (ICRISAT) et à l’Institut d’économie rurale (IER) pour des formations ( doctorat, master et licence). Quatre étudiants en master, quatre en doctorat et quatorze en licence ont été soutenus.
Les agriculteurs sont formés aux nouvelles technologies dans des champs-écoles paysans ont acquis une expérience pratique des méthodes agricoles durables. Ces formations sont accompagnées par des campagnes de sensibilisation innovantes qui font la promotion des stratégies d’adaptation au climat et mettent en valeur les atouts nutritionnels et économiques des ressources alimentaires locales.

Le projet UE-APSAN-Mali appuie également l’autonomisation des entrepreneurs dans le domaine des semences, en formant des producteurs de semences, y compris des producteurs communautaires et des coopératives, à la production de semences et à la recherche d’options viables pour leur commercialisation au niveau local. À ce jour, plus de 800 producteurs de semences, dont 37 % de femmes, ont été formés.
Cinq ans d’impact : Echos du terrain
Cinq ans après son lancement en 2019, le projet UE-APSAN-Mali affiche des résultats clairs et positifs—reflétés avant tout par les témoignages des agriculteurs eux-mêmes, en particulier des femmes, qui sont au cœur de la production alimentaire locale.
Mme Niagalé Camara, du village de Siby dans la région de Koulikoro, partage comment le projet a répondu à un besoin essentiel :
"Nous avions besoin de variétés à cycle court—et c’est exactement ce que le projet nous a apporté."
Mme Nah Diarra se souvient qu’elle ne récoltait que sept sacs de 100 kg d’arachide par hectare avec les variétés traditionnelles. Aujourd’hui, grâce aux variétés améliorées introduites par le projet APSAN, son rendement est passé à dix sacs de 100 kg par hectare—un bond significatif qui a transformé non seulement sa propre récolte, mais aussi la productivité de tout le groupe de productrices d’arachide de son village de Wakoro.

Mme Maïmouna Doumbia, du village de N’Gabélé, souligne les performances impressionnantes d’une variété améliorée de niébé introduite par le projet :
" J’ai semé l’ancienne variété 20 jours avant ICAR (une variété améliorée de niébé), et pourtant ICAR l’a dépassée en croissance et en maturité. Elle est ultra-précoce et très productive " , dit-elle.
Au village de Zéta, plusieurs agriculteurs signalent également une nette amélioration de leur productivité et de leurs moyens de subsistance. M. Sékou Sidibé a cultivé 0,80 hectare et récolté 14 sacs de 100 kg chacun. La vente de sa récolte lui a rapporté 200 000 FCFA (environ 330 USD), qu’il a su utiliser pour acheter un panneau solaire et une batterie. Cela a permis d’électrifier sa maison, permettant à ses enfants d’étudier le soir, et de rembourser quelques dettes familiales.
De même, M. Bourama Fomba a tiré des bénéfices concrets de la culture de variétés améliorées sur sa ferme de 0,5 hectare à Soubatimi :
"J’ai récolté 12 sacs de 100 kg chacun. En en vendant 10, j’ai obtenu 200 000 FCFA (environ 300 USD), que j’ai pu utiliser pour rembourser mes dettes et couvrir les frais médicaux de ma sœur. J’ai gardé deux sacs pour la consommation familiale et je prévois de vendre les tiges aux éleveurs pour augmenter encore mes revenus ", explique M, Fomba.
Ces témoignages reflètent l’impact croissant du projet UE-APSAN-Mali dans la transformation des moyens de subsistance agricoles grâce à des semences de qualité et à l’adoption de pratiques agricoles intelligentes face au climat.

Mise en valeur d’une agriculture résiliente au climat : Exposition conjointe UE-ICRISAT à Bamako
Une exposition conjointe organisée par la Délégation de l’Union européenne et l’ICRISAT, le 13 mars 2025, a mis en lumière le rôle essentiel des cultures résilientes au climat pour bâtir des systèmes alimentaires plus solides et durables. Organisée au Centre culturel français de Bamako, l’événement a attiré des visiteurs venus d’Afrique et d’Europe.
Au cœur de l’exposition, le stand UE-ICRISAT présentait des produits transformés à base de mil, sorgho, arachide et niébé, démontrant le potentiel des cultures locales pour promouvoir une alimentation durable, des revenus stables et la résilience des systèmes alimentaires.
L’exposition a également souligné les progrès du projet UE-APSAN-Mali en cinq ans. Actuellement, le projet soutient 10 000 ménages bénéficiaires directs et touche 30 000 ménages supplémentaires de manière indirecte. Grâce à l’introduction de variétés améliorées et résilientes au climat—neuf de mil, quinze de sorgho, neuf d’arachide et six de niébé—dans quatre régions clés (Ségou, Sikasso, Kayes et Koulikoro), les rendements moyens sont passés de 880 kg/ha à 1 300 kg/ha.
"Le projet UE-APSAN-Mali prouve que l’adaptation au changement climatique n’est pas seulement possible—elle est déjà en cours. En promouvant des pratiques agricoles durables, en impliquant activement les communautés locales et en autonomisant les agricultrices, le projet contribue de manière significative à renforcer la résilience et à améliorer les moyens de subsistance", déclare Dr Himanshu Pathak, Directeur général de l’ICRISAT.
Ce travail contribue aux ODDs 1, 2, 13 et 17.
Agathe Diama